Traitement et indications dans les ruptures du Ligament Croisé Antérieur (LCA)
François Combelles chirurgien orthopédiste Vincent Chassaing chirurgien orthopédiste
Date de dernière modification de la page : 22/07/2009
Le but du traitement des ruptures du LCA est de rendre au blessé un genou stable pour qu'il puisse retrouver ses capacités physiques et sportives.
Le traitement des ruptures du ligament croisé antérieur a beaucoup évolué ces dernières années:
- La suture directe du LCA a été abandonnée. On sait maintenant que ses résultats sont toujours insuffisants et ne permettent pas d'obtenir un genou suffisamment stable.
- Le remplacement du LCA par prothèse ligamentaire lui aussi a été abandonné en raison du risque de douleurs, raideur, gonflement et rupture secondaire rapide.
Ainsi, actuellement, le choix se fait entre :
- la rééducation fonctionnelle Cette rééducation, (des précisions sur cette rééducation sur le site www.votrekinesi.com), est indispensable pour obtenir une bonne récupération musculaire. Mais le muscle ne peut pas remplacer le ligament croisé antérieur, et ne peut donc éviter des accidents d'instabilité ultérieurs. Ces accidents surviennent en effet à l'occasion d'une brusque torsion lors de la pratique sportive, à un moment où on ne s'y attend pas, dans le feu de l'action. La contraction musculaire, qui aurait pu protéger le genou, intervient une fraction de seconde trop tard et ne peut alors éviter l'entorse.
- la reconstruction du LCA en place par greffe autologue, c’est à dire prélevée sur le sujet opéré, qui remplace le ligament déchiré. Plusieurs greffes peuvent être utilisés :
* le tendon rotulien, intervention de Mac Intosh au tendon rotulien et surtout de Kenneth Jones : c'est l'intervention classique, la plus fréquemment pratiquée. Dans l'opération de Kenneth Jones, le tiers du tendon rotulien est prélevé avec une petite barrette osseuse à chaque extrémité : il remplace le ligament croisé antérieur dans l’échancrure, et les barrettes permettent sa fixation solide. Cette intervention donne d'excellents résultats sur la stabilité, mais a pour inconvénient la possibilité de séquelles douloureuses au niveau du tendon rotulien ou de la rotule qui peuvent persister longtemps. Les interventions suivantes n'ont pas cet inconvénient.
* le fascia lata : le fascia lata est une aponévrose, sorte de cloison fibreuse située à la face externe de la cuisse. Une bandelette peut en être prélevée pour remplacer le ligament croisé antérieur. Cette intervention est connue sous le nom d'opération de Mac Intosh au fascia lata : la bandelette passe à l'intérieur du genou où elle remplace le ligament croisé antérieur, puis est tendue à la face externe du fémur au tibia pour s'opposer à l'instabilité en rotation. Les chirurgiens qui pratiquent cette intervention rapportent de bons résultats. Elle a l'inconvénient d'entraîner une longue cicatrice à la face externe de la cuisse et du genou.
* les tendons de la « patte d'oie » : l'intervention utilise les tendons de deux muscles, le Droit Interne et le Demi Tendineux (DIDT) qui longent la face interne du genou : ces muscles sont accessoires, et le prélèvement de leurs tendons n’a pas de conséquence néfaste sur le fonctionnement ultérieur du genou. Chaque tendon est suffisamment long pour être plié en deux, permettant d’obtenir un nouveau ligament croisé, solide, à quatre faisceaux. Cette opération a l'avantage de ne pas laisser des douleurs résiduelles ultérieures sur le tendon rotulien.
L’utilisation au cours de ces interventions de l'arthroscopie permet de limiter la taille des cicatrices et de traiter dans le même temps opératoire d’éventuelles lésions méniscales.
A cette greffe tendineuse intra-articulaire peut être associée une plastie extra articulaire de Lemaire : ils s’agit du prélèvement d’une bandelette de fascia lata qui est tendue obliquement du fémur au tibia à la face externe du genou et qui a pour but de mieux contrôler l’instabilité en rotation entraînée par la rupture du LCA. Cette association est surtout indiquée dans les instabilités anciennes et importantes.
Il n'y a pas d'opposition entre chirurgie et traitement fonctionnel. Ce dernier doit d'ailleurs être entrepris en phase aiguë, puis complété par une stabilisation chirurgicale si elle est indiquée.
En règle, un délai d'environ deux mois est souhaitable avant l'intervention. Cela permet d’opérer un genou qui a bien récupéré de l’accident initial, et les suites opératoires en sont plus simples. L'intervention peut être proposée de façon beaucoup plus précoce chez des sujets sportifs, professionnels ou de compétition, motivés et pressés, si l'état du genou le permet.
De toute façon, devant une rupture fraîche du ligament croisé antérieur, il n'y a pas d'urgence à opérer. C'est le désir du patient de retrouver un genou stable le plus vite possible pour reprendre le sport, qui fixe alors la date de l'intervention. Le fait d’attendre avant de se faire opérer n’a pas de conséquences fâcheuses, à condition bien sûr de ne pas reprendre d’activités sportives autres que la natation, le vélo ou le footing
1 L’âge
Plus le sujet est jeune, plus grande est la nécessité de reconstruire son ligament croisé antérieur. Mais l’intervention reste possible quel que soit l’âge si la motivation est là : on a l’âge de ses genoux !
2 La motivation, le sport pratiqué et le niveau de compétition
Un joueur de handball de 20 ans est plus chirurgical qu'un randonneur cycliste de 50 ans.
Les sports avec pivot nécessitent un ligament croisé antérieur intact ; avec un ligament rompu, il ne faut pas les reprendre, même si au début les patients ne ressentent pas d'instabilité fonctionnellement gênante. Le risque serait alors la survenue de nouvelles entorses dont la répétition risquerait d’entraîner d’autres lésions ligamentaires, des ruptures méniscales voire des lésions cartilagineuses pouvant conduire à l’arthrose ultérieure.
3 Le degré de laxité initiale est aussi un facteur important
L'examen clinique et les tests dynamiques permettent d’apprécier cette laxité, variable d’un sujet à l’autre. Nous utilisons systématiquement le lachman test radiologique pour quantifier cette laxité. Bien que non absolu, il existe un parallélisme entre la laxité retrouvée à l’examen du genou et l’importance de l’instabilité que risque de ressentir le blessé.
4 L'état des ménisques
L'existence d'une lésion méniscale, surtout si le ménisque peut être conservé (au besoin par une suture), constitue un argument en faveur d'une réparation du ligament croisé antérieur. La conservation des ménisques, que favorise la stabilisation du genou, est le meilleur moyen de prévenir le risque d'arthrose ultérieure.
5 La constitution du sujet
La tolérance d'une même rupture du LCA est très différente d'un sujet à l'autre.
Chez un sujet musclé, raide et en léger varus, la rupture du LCA peut être longtemps tolérée.
Chez la jeune fille laxe au génu valgum récurvatum, la rupture du LCA risque d’entraîner une instabilité rapidement gênante même lors de la vie courante en dehors de tout exercice physique.
6 L’état du genou avant l'accident
Les conséquences d’une rupture du LCA ne sont en effet pas les mêmes si le genou blessé était indemne jusqu’au jour de l’accident, ou s’il présentait déjà une arthrose ou avait été précédemment opéré, pour une méniscectomie par exemple. L’indication d’une éventuelle intervention doit tenir compte de cet état.
Chez un sujet jeune, laxe, sportif et motivé, la stabilisation chirurgicale du genou peut être proposée de principe pour éviter des accidents ultérieurs et une perte de temps préjudiciable à une carrière sportive qui est courte. Mais l’intervention n’a pas un caractère d’urgence et ses suites seront encore plus simples (2) si elle est effectuée sur un genou sec, mobile et qui a eu le temps de se remuscler.
Lorsqu’on hésite sur l’indication chirurgicale, il peut être préférable d’attendre un peu pour juger de l’évolution avec le temps de la laxité et de l’instabilité. La décision de l’opération sera ultérieurement prise en fonction de l’âge, des activités sportives pratiquées, de la motivation et bien sûr de la survenue éventuelle d’accidents d’instabilité avec un genou qui « lâche » lors de pivots, dans la vie courante ou à la reprise de certains sports. Il est possible, dans certains cas de reprendre des activités sportives, le ski en particulier, avec un ligament croisé rompu. L'avis d'un médecin spécialiste est souhaitable, car se sont des décisions difficiles.
Il ne faut donc pas décider cette opération sans arguments suffisants, mais à l’inverse il serait dommage de ne pas bénéficier d’une intervention dont on connaît la qualité des résultats et de laisser un genou instable se détériorer.
Recommandations de la Haute Autorité de Santé
Les recommandations de la HAS (Haute Autorité de Santé) permettent de mieux préciser les indications d'une opération (reconstruction chirugicale)