Les tendinites du genou |
Un peu de vocabulaire.
La
souffrance des différents tendons du genou, peut s’exprimer de différentes
manières. Il peut s’agir d’une atteinte de l’enveloppe du tendon et
l’on parle alors de ténosynovite. Il peut s’agir d’une souffrance du tendon lui-même,
que l’atteinte se situe au niveau de la jonction enter le tendon et l’os, ou
en plein corps du tendon lui-même. On parle alors de tendinite. Le terme de tendinopathie englobe toutes les souffrances
du tendon.
Le tendon est une formation anatomique, interposée entre le muscle et l’os. On définie différents segments :
le
corps du tendon
la
jonction muscle/tendon
la
jonction os/tendon (jonction ostéo tendineuse).
Le tendon est riche en eau, environ 50 à 70% . Il est constitué de collagène de type 1 qui représente 75 % de son poids sec, d’élastine (2 %) et d’une substance fondamentale, contenant des glycoaminoglycanes et de cellules qui sont des fibroblastes. Le tendon n’est pas un simple moyen de transmission entre le muscle qui est capable de se contracter, et l’os. Il présente des propriétés visco-élastiques, qui lui permettent de résister à une traction et d’emmagasiner une certaine énergie pour la restituer lors du mouvement.
Un tendon est capable sans dommage de s’allonger d’environ 5 % de sa longueur. Au delà de cet allongement, des lésions irréversibles se produisent, qui vont aboutir à une rupture à 8 % d’allongement.
Pour
isoler le tendon et lui permettre un glissement plus facile, il existe une
structure péri tendineuse, une gaine synoviale. Il existe également des systèmes
de glissement, répartis au niveau des zones où le frottement peut être élevé,
qui s’appellent des bourses conjonctives. Le volume du tendon peut se développer
en fonction de l’entraînement et ceci jusqu’à la fin de la croissance. Après,
un entraînement régulier ne pourra développer ce tendon. De même, en
vieillissant, les qualités élastiques et de résistance du tendon diminuent.
1/
Les tendinopathies de traction
Ce sont celles que l’on rencontre le plus fréquemment au niveau du genou.
Elles peuvent survenir de manière brutale, sur une impulsion, un mouvement puissant, ou, de manière progressive, sur des mouvements répétitifs : freinage, sauts… Le surmenage peut se produire de deux manières :
Soit
il s’agit d’une activité sportive, dont la durée s’est largement majorée.
Soit
d’une activité sportive dont l’intensité s’est majorée.
2/
Les tendinopathies par frottement ou compression
Des frottements ou des balayages répétés,
débouchent le plus souvent sur une souffrance de l’enveloppe située autour
du tendon (ténosynovite) ou de l’atteinte des structures de glissement
(bursite). Le cas le plus typique est le syndrome de balayage du tenseur du
fascia lata.
3/
Les tendinopathies par choc direct
Elles sont beaucoup plus rares, se rencontrent volontiers dans les sports de contact. Les lésions sont variables, suivant le type d’agent vulnérant.
On
peut rencontrer des lésions péri tendineuses, intra tendineuses, au niveau du
corps ou de l’insertion du tendon.
La
pathologie du tendon est le plus souvent en rapport avec une rupture de quelques
fibres tendineuses. Dés que cette lésion s’est produite, l’organisme met
en marche des processus de cicatrisation. Pendant les trois premiers jours, les
polynucléaires et des macrophages, infiltrent la zone lésionnelle. Il
s’associe un œdème avec la formation de néo capillaire. A partir du 4ème
jour, on assiste à un développement des fibres blastes qui permettent
d’aboutir vers la fin de la 3ème semaine à un tissu de
granulation. C’est à la fin du 1er mois que se produit la véritable
cicatrisation par l’intermédiaire d’un cal tendineux. La régénération
complète se situe à la fin du 3ème mois. Le processus de guérison
n’est cependant pas acquis, car il persiste au niveau du tendon un déficit de
résistance à la traction, qui peut atteindre 30 %. Il semble que la récupération
complète nécessite une année. Pour certains, un déficit de 20 à 30 % peut
persister. Parfois la cicatrisation est de moins bonne qualité et il persiste
au sein du tendon des foyers de nécrose, des nodules fibro cicatriciels, des
cavités kystiques, des calcifications.
Avec l’âge, les processus cicatriciels et de réparation deviennent moins performants.
Ce
phénomène s’accélère tout particulièrement après 60 ans.
Contrairement
à ce que l’on a longtemps pensé, la mise au repos complète d’un tendon
qui présente une souffrance tendineuse, n’est pas forcément une bonne chose.
Au contraire, une activité bien dosée et contrôlée améliore la qualité de
la réparation tendineuse. A l’opposé, une reprise trop précoce des activités
sur un tendon fragilisé, est alors très péjorative.
C’est
de loin la plus fréquente des tendinites du genou.
Le tendon rotulien est un épais ruban
fibreux, extrêmement solide, qui s’étend de manière plus ou moins oblique,
en bas et en dehors de la pointe de la rotule, à la tubérosité tibiale antérieure.
Son épaisseur est en moyenne de 7 mm. Il est de forme un peu triangulaire,
puisqu’il mesure 3 cm à sa partie supérieure et 2 ,5 cm à la partie
inférieure.
Les
tendinites rotuliennes sont le plus souvent des tendinites d’insertion au
niveau de la pointe de la rotule. Elles se rencontrent volontiers dans les
sports qui nécessitent des courses, des impulsions, des sauts. Parmi les sports
on retrouve l’athlétisme (saut), le basket, le volley, le handball, le
football, le ski.
La
localisation au niveau de la pointe de la rotule est la plus fréquente, puis
celle au niveau du corps du tendon et enfin, celle au niveau de l’insertion
basse sur la tubérosité tibiale antérieure. Le début des troubles est
habituellement progressif, dans quelques cas il est brutal.
Suivant l’intensité de la pathologie, on retrouve des douleurs au repos : position assise, conduite automobile, lors de la vie courante : montée des escaliers, descente des plans inclinés, efforts de flexion bi ou unipodal. Il peut s’agir d’une douleur de dérouillage où le sportif est gêné pendant les premières minutes et dés que l’échauffement s’est effectué, la douleur disparaît complètement pour ne réapparaître que lorsque le sport est arrêté ou lorsqu’il a été trop prolongé. Dans les cas les plus légers, la douleur ne se retrouve que lorsqu’il s’agit d’efforts d’intensité importante.
L’examen
clinique doit être bilatéral et comparatif. A la palpation on retrouve une
douleur à la pointe de la rotule, qu’il est parfois plus facile de mettre en
évidence, en appuyant sur la base de la rotule, pour permettre à la pointe de
se soulever et ainsi de mieux se dégager. Le genou lors de cet examen est en
extension. C’est la palpation qui retrouvera la localisation exacte de la
douleur. Pointe, corps, insertion au niveau du tibia.
Cette
palpation peut retrouver un épaississement, une encoche, un véritable
nodule…
Les
tests cliniques sont utiles : mise en tension du tendon dans les différentes
courses. Compte tenu de la puissance du muscle quadriceps, il set souvent préférable
de mettre le sujet en charge, en appui sur une seule jambe et de lui demander de
fléchir son genou, ce qui reproduit habituellement la douleur, qu’il est
capable de localiser de manière tout à fait précise.
Les
examens complémentaires comprennent de manière systématique des radiographies
simples de bonne qualité, avec les trois clichés habituels.
Le
cliché de profil est le plus intéressant, puisqu’il permet de visualiser la
hauteur de rotule, un éventuel épaississement du tendon rotulien, si la définition
de l’imagerie est suffisance, l’existence de calcifications, voir de véritables
ostéomes, séquelles de maladie de croissance ou d’arrachement. On visualise
en outre la hauteur de la rotule, par rapport au plateau tibial, , une
dysplasie de trochlée.
L’échographie
est un examen très performant qui permet de visualiser le nodule, l’épaississement,
les bursites associées.
La
résonance magnétique est un examen très performant, d’autant que l’on bénéficie
à la fois de coupes sagittales et horizontales.
Le tendon quadricipital est formé par la réunion des tendons des quatre portions du quadriceps et se répartissent en 3 plans de la superficie à la profondeur.
Cette
tendinite se rencontre dans les sports qui font appel à des efforts dynamiques
en charge, des impulsions brusques ou des blocages en flexion violente :
haltérophilie, escrime, volley, basket, patinage. Les lésions se situent
surtout au niveau du plan superficiel, du droit antérieur et du plan moyen
externe, vaste externe.
Le
geste déclenchant semble être surtout les contraintes de freinage brutal,
imposées au quadriceps, lors de réceptions de sauts. Le mécanisme est sans
doute un étirement violent et répété du tendon.
La
douleur est d’apparition progressive, le plus souvent. Le début brutal se
retrouve plus volontiers chez les sujets à forte corpulence ou lors de ports de
charge importantes.
La
localisation est antérieure, plus volontiers située sur la partie externe de
la base de la rotule.
Comme
pour le tendon rotulien, différentes intensités sont possibles.
L’examen
clinique caractéristique retrouve une douleur provoquée à l’étirement
passif. La douleur lors de la contraction isométrique est principalement
retrouvée en charge, en station unipodale.
La
palpation retrouve un point douloureux exquis, plus souvent repéré en faisant
basculer la rotule. Le point est souvent médian et superficiel, juste sur le
bord de la base de la rotule, voir un peu plus haut. Il peut déborder au niveau
du surtout fibreux péri rotulien. La localisation externe, un peu au dessus de
la base de la rotule est également fréquente. On ne retrouve habituellement
pas de nodule, mais parfois un empâtement localisé. Exceptionnellement,
une encoche traduit une rupture partielle.
Les
examens complémentaires :
La
radiographie standard de profil, recherche un épaississement du tendon et des
calcifications qui sont extrêmement fréquentes. Elles sont habituellement en
forme d’épine, parfois morcelées.
L’échographie
n’est pas très facile car on se situe à proximité de la zone osseuse. On
peut retrouver une zone hypo-échogène qui correspond à une rupture partielle,
une bursite ou une zone cicatricielle.
L’IRM
est utile, principalement en cas de doute, ou en pré chirurgical.
C’est la plus fréquente des ruptures de l’appareil extenseur du genou. Elle survient rarement de manière initiale. Le mécanisme en est habituellement une prise d’appel avec contraction du quadriceps, genou en extension. Cette rupture du tendon rotulien survient habituellement dans un contexte de tendinite chronique, que le genou ait été opéré ou non.
Les
infiltrations de corticoïdes semblent être un facteur favorisant de ces
ruptures tendineuses.
L’examen
clinique est habituellement facile et le diagnostic est vite posé. Le patient
ressent une violente douleur au niveau de son genou, l’impulsion est stoppée,
c’est la chute. L’impotence fonctionnelle secondaire est totale.
Si
l’examen clinique est effectué dans les quelques heures qui suivent
l’accident, on peut retrouver une dépression, traduisant l’encoche de la
rupture. La rotule est située trop haute, le lever de jambe est impossible.
La
radiographie confirme l’ascension de la rotule, rassure sur l’absence de
fracture.
Parfois
le diagnostic est plus difficile à poser, surtout s’il se situe dans un
contexte d’entorse grave du genou.
Elle est beaucoup plus rare que la rupture du tendon rotulien. Elle se retrouve plutôt dans des mécanismes de réception de sauts, de chute sur les genoux en flexion forcée.
La
douleur est de siège sus rotulien, un peu au dessus de la base de la rotule. Si
l’examen est précoce, on peut retrouver une encoche. L’impotence
fonctionnelle est totale. On retrouve une hémarthrose systématique.
La
radiographie montre une rotule un peu trop basse.
L’échographie
peut être nécessaire pour confirmer la rupture si l’on se trouve à distance
de l’accident.
Le repos complet est rarement indiqué. En effet, il présente plus d’avantages que d’inconvénients. Il favorise une importante amyotrophie et ne semble pas diminuer le temps de récupération.
On
lui préfère le repos relatif, que ce soit dans des cas aigus, la mise en
décharge relative par une paire de cannes anglaises, l’utilisation de
strapping ou de genouillère.
Les traitements anti-inflammatoires, non stéroïdiens, ont une action variable sur la tendinite rotulienne ou quadricipitale.
Ils
sont sûrement indiqués en phase aiguë, par contre à la phase chronique, ils
ont beaucoup moins d’intérêt. Il peuvent être utilisés soit sous forme de
comprimés, soit sous forme de gel, ou de patch.
La
mésothérapie semble moins efficace au niveau du tendon rotulien que du tendon
d’Achille. On utilise des mélanges, habituellement associés à un anti
inflammatoire, un vasodilatateur et un anesthésique.
Le
nombre de séances est fonction des résultats.
Leur utilisation est très controversée. Leur nombre doit toujours être limitatif, il doit être effectué en péri tendineux et doivent s’accompagner d’un repos sportif complet dans les suites immédiates.
La
physiothérapie utilise plusieurs techniques : ultrasons, courant
antalgique, laser…
Le
massage transversal profond est un massage très puissant appliqué comme son
nom l’indique transversalement au tendon et ce de manière très appuyée.
Dans le même esprit on peut utiliser des techniques de crochetage avec des
instruments dont le but est de pouvoir effectuer un massage plus large et plus
précis au niveau de la zone douloureuse.
Les
appareils d’électrostimulation peuvent être utilisés à la fois comme
appareils de drainage, mais également dans un but de renforcement musculaire.
En
dehors du classique traitement d’étirement des plans postérieurs et surtout
antérieurs, avec technique de contracté relâché, une technique originale a
été développée par l’équipe de STANISH. Il s’agit d’un protocole en
excentrique effectué en chaîne fermée.
Trois
orientations existent dans ce traitement :
Augmenter
la longueur et l’élasticité de l’unité muscle/tendon par des étirements.
Augmenter
progressivement la charge pour faire progresser les limites de la résistance
du tendon.
Travailler
la vitesse de contraction et donc les amortissements pour augmenter les
possibilités de résistance aux contraintes sur le tendon.
La
première phase insiste sur le travail à orientation statique, c’est à dire
à une musculation sans déplacement, que l’on effectue simplement de la façon
suivante : le patient fléchit les genoux pieds à plats, haut du corps
vertical en débutant par une flexion à 30°. Cette position est maintenue
quinze à trente secondes et répétée trois à cinq fois. Chaque jour la
flexion est augmentée pour obtenir en fin de compte 45 à 60°. Ces exercices
seront les seuls à exécuter pendant la 1ère voire la seconde semaine, en
fonction de l’importance des phénomènes douloureux. Si les douleurs
semblent se majorer, il faudra alléger le programme et recommander au patient
de se relever de cette position à la force des bras.
La
seconde phase débute à la 3ème semaine. Elle est composée d’exercices
orientation excentrique que l’on effectue de la façon suivante : Il
s’agit d’exercices dynamiques de flexion entre 10° et 45°de flexion des
genoux, comportant donc une descente puis « un relevé » du tronc en
veillant à ne pas avoir un arrêt brutal et en essayant d’amortir le plus
possible. Cet exercice est répété 3 fois par séries de 10. Il s’agira au début
de flexions lentes puis de flexions intermédiaires et le 6ème et le 7ème jour
de flexions rapides.
Toute
séance de travail sera précédée d’exercices d’échauffement, de massage
et surtout d’étirements de l’appareil extenseur du genou. Ces mêmes étirements
seront répétés en fin de chaque exercice. Le glaçage du tendon douloureux
sera systématique en fin d’exercice.
Le
traitement s’étale sur 4 à 6 semaines, en fonction de l’importance de la
tendinite. Les sports non traumatisants pour le tendon, (notamment natation et vélo
en moulinant) seront réintroduits à la 2ème semaine, à condition d’être
pratiqués après une séance d’échauffement et d’étirements et que le
tendon soit glacé en fin d’activité.
En
cas de douleur persistante et malgré un traitement médical bien conduit, on
peut être amené à proposer un traitement chirurgical.
H. BARD. Physiopathologie
des tendinopathies. Congrès sport et appareil locomoteur. 6ème
journées de Bichat. Mars 93. 50-66.
F. COMBELLES, J. MERAT Tendinite quadricipitale. Aspect anatomique, diagnostique et thérapeutique. J. Traumatol. Sport. 1985, 2,81-87.